Ancien international et meilleur buteur du championnat algérien de tous les temps, Nacer Bouiche garde un regard attentif sur la JSK, son club de cœur. Interrogé sur le début de saison des Canaris, il livre une analyse lucide, sans complaisance, mais toujours constructive. Entre exigence et passion, il appelle à plus de confiance, d’efficacité et d’intelligence de jeu pour relancer la machine kabyle.
Nacer, quel regard portez-vous sur le début de saison de la JSK ?
C’est un début décevant au regard de ce que représente ce club. Avec l’arrivée d’un nouvel entraîneur, de recrues de qualité et un public toujours présent, on s’attendait à mieux. Pour l’instant, on ne peut pas dire que la JSK a raté complètement son départ, mais c’est très moyen. À la dimension de ce club, on doit viser plus haut.
Selon vous, qu’est-ce qui manque à cette équipe ?
Il manque un match de référence. Un match qui serve de déclic, qui donne confiance à tout le monde et qui lance vraiment la saison. La JSK joue bien, crée des occasions, mais l’efficacité n’est pas au rendez-vous. C’est un problème récurrent. Dans un match où tu as dix occasions, tu ne peux pas n’en concrétiser qu’une seule. L’efficacité, la lucidité, c’est ça la clé.
Que pensez-vous du recrutement effectué cet été ?
Franchement, le recrutement est bon. Quand tu ramènes des joueurs comme Messaoudi, Mahious, Merghem, Belaïd et d’autres, tu ne peux pas dire que tu n’as pas de qualité. Ce sont des joueurs capables d’apporter un plus. Mais attention, les noms seuls ne suffisent pas. Il faut de la complémentarité, de la discipline tactique et surtout de l’envie.
Vous insistez beaucoup sur l’attaque et notamment sur Mahious…
Mahious, c’est un attaquant mature, il a 27-28 ans, ce n’est plus un jeune. À cet âge, tu dois assumer ton rôle de leader offensif. Tu rates un penalty ? Ce n’est pas grave. Tu rates deux, trois occasions ? Ce n’est pas grave. Mais tu dois revenir et finir par marquer. Les plus grands attaquants du monde ratent, mais ils reviennent toujours. Ce qui compte, c’est la confiance en soi et la force mentale.
Que doit-il améliorer concrètement ?
Il doit travailler ses déplacements. Ses appels doivent être diagonaux, dans le dos des défenseurs. Il doit bouger, créer des solutions, donner des solutions. Dans la surface, il faut être un renard, un joueur malin. Les 18 mètres, c’est son royaume : il doit y être vif, intelligent et décisif. Le dernier geste, c’est ce qui fera de lui le véritable patron de l’attaque.
Vous avez évoqué l’importance du collectif…
Bien sûr. Je vous donne un exemple : à la Juventus, Platini et Boniek se comprenaient à merveille. Il suffisait d’un regard, et l’action partait. C’est ça qui manque à la JSK, de l’automatisme, de la complicité. Les joueurs doivent se chercher, se trouver, et aller vite vers l’avant. Je voudrais parler d’un joueur en particulier…
Lequel ?
Ryad Boudebouz, avec son expérience, il doit être le chef d’orchestre. Même sans courir beaucoup, il a la technique et le vécu pour faire jouer ses attaquants. C’est un joueur capable de fluidifier le jeu et de rendre les autres meilleurs. Dans une équipe comme la JSK, il peut être un élément fondamental. Il doit donner encore plus, s’impliquer et s’appliquer, la JSK à besoin de son talent.
Vous avez aussi insisté sur le mental collectif…
Oui, parce que rater fait partie du football. Mais le mental, c’est la différence entre une grande équipe et une équipe moyenne. Tu rates une fois, deux fois, trois fois, mais tu reviens toujours. L’important, c’est d’avoir la grinta, l’ardeur, l’envie de gagner. Avec ça, tu vas finir par t’imposer. Je m’adresse aux attaquants, sur les centres, placez-vous chacun d’un côté, premier et deuxième poteau et même sur le point de penalty, le ballon trouvera l’un de vous, c’est évident.
Justement, quel rôle joue le public kabyle dans tout ça ?
C’est un public en or. Les supporters de la JSK viennent toujours, ils remplissent les gradins, ils encouragent. Mais ils veulent voir de la manière, du spectacle, et surtout des victoires. Si tu leur donnes ça, ils te portent. C’est une force incroyable qu’il ne faut jamais décevoir.
Un mot enfin sur l’entraîneur Zinnbauer ?
Il a une mission difficile, mais c’est à lui de trouver la solution. À la JSK, tu n’as pas droit au temps. Il faut convaincre vite. Les supporters ne pardonnent pas les faux départs. J’espère qu’il saura sortir les bonnes cartes de son chapeau et faire les bons choix tactiques pour remettre l’équipe sur la bonne voie.
La JSK affrontera les Bibiani Gold Stars ce dimanche. Après la victoire 2-0 à l’aller, peut-on dire que la qualification est déjà assurée ?
Non, jamais. Un 2-0, ce n’est pas un 4-0 ou un 5-0. On n’assure rien tant que le deuxième match n’est pas joué. La JSK doit prendre le retour très au sérieux. Il faut jouer avec rigueur, concentration et confiance. Si les joueurs abordent ce match comme il faut, ils passeront, mais il ne faut surtout pas tomber dans le piège de la facilité.
Said Djoudi