Hadj Ikhlef : «L’amour du football et de la formation sont les clés de la réussite»

Khaled Hadj Ikhlef formé au NAHD est passé par l’USMA et le CRB pour ne citer que ceux-là. C’est avec beaucoup de regrets qu’il regarde le football actuel en Algérie qui, selon lui, a beaucoup régressé pour les raisons qu’il a développées dans cet entretien.

Aujourd’hui, le niveau du championnat algérien n’a pas vraiment évolué depuis quelques années. Or, à votre époque le niveau était déjà élevé, mais n’a pas évolué, pourquoi selon vous ?

C’est une question d’éducation, de formation d’environnement. Aujourd’hui, le football algérien ne peut être en aucun cas au niveau mondial. Que ce soit en partant des années 60, des années 70, 80 ou 90 années où l’Algérie a décroché son unique coupe d’Afrique des nations. Le football algérien s’est arrêté en 1990 avec cette coupe. Si vous me demandez pourquoi, je vous dirais simplement parce que tous ces jeunes-là ont été sélectionnés en minimes, en cadets, en juniors en équipe militaire, donc ils étaient pour beaucoup d’entre eux déjà ensemble depuis les jeunes catégories et en constante progression grâce à cela. Sans parler de l’encadrement assuré par des gens compétents. C’est qui les encadreurs qu’il y avait à l’époque ? C’est Makhloufi, C’est Sokhane Abderrahmane et Sokhane Mohamed, c’est Ibrir, c’est Smaïl Khabatou, que Dieu ait son âme, et j’en passe… Mais avec ce qu’on a actuellement comme formateurs, on peut dire qu’on n’a pas grand-chose. Le football doit appartenir aux footballeurs. Dans toutes les équipes dans le monde, vous trouvez que du président jusqu’au garde-matériel, tous ont joué au football. Avec ce qu’on a aujourd’hui, on ne peut avoir ni une EN de locaux ni un championnat qui se respecte.

Il y a certainement d’autres raisons…

Oui, le problème réside aussi chez les joueurs et leur qualité. Cette jeunesse qui va au stade pour suivre une rencontre est en train de se défouler sans avoir rien vu de leur vie. Et ils essaient tant bien que mal de voir un match du Real de Madrid avec Barcelone, puis ils vont voir un match DRBT-RCR, laissez-moi vous dire qu’il y a un énorme fossé. Quant à l’EN, aucun des joueurs locaux n’a la possibilité ni la faculté ni l’éducation tactique ou la formation pour jouer au niveau mondial.

Le sélectionneur national, Gourcuff, ne risque pas de trouver son compte dans ce cas, n’est-ce pas ?

Les gens se plaignent de Gourcuff, mais sans chercher à le défendre, il faut savoir qu’il est en train de faire actuellement ce qu’il fait parce qu’il n’a pas trouvé suffisamment d’ingrédients, suffisamment de joueurs locaux pour qu’il puisse former et les faire jouer.

Le remède serait quoi ?

Le remède consiste à revenir à la formation, ramener des éducateurs, ramener des anciens joueurs… Le problème est organisationnel. Si au niveau de chaque quartier on fait de la prospection. Il faut des bénévoles pour repérer de jeunes talents et faire en sorte de les encadrer. L’argent a malheureusement pourri notre football. Si on prend par exemple le cas de Belaïli, qui gagnait un salaire enviable, il était en quelque sorte victime d’un mauvais encadrement. On aurait dû le diriger, l’orienter au lieu de l’incriminer. Il faut prendre soin de ces joueurs pour éviter qu’ils tombent dans ces pièges. Aujourd’hui, il est suspendu pour 4 ans, il ne risque pas de revenir à son meilleur niveau.

Pour ce qui est du championnat, y a-t-il une possibilité qu’il redevienne fort ?

A mon sens, il y a certaines règles que la FAF doit revoir. Pour qu’il y ait une progression, il faut limiter le nombre de licences. Les réduire de moitié donnerait la possibilité aux joueurs espoirs ou même juniors de jouer en équipe A. Personnellement, en étant cadet, j’ai eu la chance de jouer comme seniors. Il y a beaucoup de joueurs qui évoluaient en seniors à 16 ou 17 ans à notre époque. Aujourd’hui, on ramène des joueurs de l’étranger, pour eux c’est la planque, ils gagnent de grandes sommes sans pour autant jouer. Par contre, si on prend un Chita au MCA, c’est un jeune qu’on a lancé et qui n’a pas déçu. Dans plusieurs clubs, il y a de jeunes talents qu’on peut mettre dans le bain.

Pour ce qui est du limogeage des entraîneurs, la FAF a mis en place un nouveau règlement qui consiste à délivrer deux licences par an aux entraîneurs, est-ce une bonne solution, selon vous ?

Je pense que la solution n’est pas forcément dans ce nouveau règlement, mais plutôt chez les présidents de club qui doivent partir. Ils sont gérés par la rue. Pendant des années, ils sont là, mais maintenant il est temps que les choses changent.  Si vous mettez un Bensiam d’un côté et un président X pour ne pas citer de noms de l’autre, c’est une très grande différence. C’est un autre monde. Si vous voulez que le football algérien guérisse, il faut mettre le holà, il faut un changement radical. Il faut un assainissement, une razzia car on ne peut plus même pas donner de joueurs à l’EN. 

Qu’est-ce qui a changé par rapport à votre époque ?

A notre époque au NAHD par exemple, on faisait des stages en Angleterre, on jouait des tournois à l’étranger avec l’EN en jeunes catégories, les gens aimaient le football et étaient dévoués, il y avait l’amour de la patrie et du football. Aujourd’hui, les joueurs ne savent même pas faire un amorti et gagnent des millions.

Que pensez-vous du niveau du championnat cette saison ?

Je peux vous dire dès maintenant qui seront les équipes qui vont jouer les premiers rôles et la relégation. Souvenez-vous bien, il y aura le RCA, l’ASMO, le RCR et Blida, ce sont là les équipes qui joueront la relégation. Pour les premiers rôles, nous aurons le MCA, l’USMA, l’ESS, l’USMH, la JSK le MOB et la JSS. Rappelez-vous bien cela, on en reparlera.

R. H.

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