Medjani : «Je veux marquer l'EN comme le grand Antar»

Samedi soir au stade du Hainaut de Valenciennes, l’AC Ajaccio avec Carl Medjani et sans Mehdi Mostefa, suspendu, défiait le VAFC de Foued Kadir chez lui. Compétition a profité de l’occasion pour vous proposer un zoom, une photographie de la forme du momen   Nous avons aussi profité de la présence de l’Algérien insulaire sur le continent pour obtenir un entretien exclusif de Medjani, quelques heures seulement après la publication de la liste des 23 joueurs pour le capital Libye-Algérie du 9 septembre prochain. C’est un Carl Medjani d’une amabilité et d’une gentillesse extrême, qui malgré la lourde défaite que venait de subir son équipe, est venu nous retrouver en zone mixte pour ouvrir son cœur aux lecteurs de Compétition.

- Carl, première question difficile. Quelle est votre analyse à chaud de cette défaite trois buts à zéro de votre équipe Ajaccio face à Valenciennes ?
- Je pense que ce soir, nous avons réalisé un non match par excellence. Nous n’étions pas dedans dès les premières minutes, et ce qu’on craignait est arrivé, nous avons eu une soirée très difficile. En plus de notre mauvais début de match, nous leur avons encore facilité les choses en nous mettant encore plus en danger après l’expulsion de notre coéquipier Pierazzi à la demi-heure de jeu. A ce moment-là, malgré toute notre volonté, c’était difficile à onze contre onze, mais à dix contre onze, c’était quasiment mission impossible. 
- On vous sent très déçu ?
- Maintenant, il s’agira de ne pas s’arrêter là et de tout faire pour rebondir Incha Allah. Il va falloir oublier très vite cet «accident» et plutôt positiver avec notre bon début de championnat. Cette défaite va nous permettre de nous remettre en question et d’être sur nos gardes la prochaine journée à Evian.
- Ajaccio prend beaucoup de cartons rouges, comment l’analysez-vous ?
- C’est notre deuxième carton rouge en trois journées, des cartons rouges qui viennent très tôt dans le match et nous handicapent durant plus d’une heure de jeu en infériorité numérique. Il va falloir aussi que l’on se remette en question, car avec notre jeu basé sur un engagement total, les arbitres commencent à nous remarquer. Un seul mot d’ordre, se remettre au boulot dès mardi pour corriger tout ça.
- On a connu Medjani le «Red» de Liverpool, le Vert de Saint-Etienne, mais aussi le Merlu de Lorient, mais c’est celui d’Ajaccio qui a été le plus performant professionnellement parlant. La saison passée, vous avez fait un sans-faute. Etes-vous prêt à rééditer les mêmes exploits cette saison ? 
- Et bien, honnêtement, j’espère que oui. C’est vrai que la saison dernière, les choses se sont plutôt bien passées pour moi, surtout dans la seconde partie du championnat. Je pense que par rapport aux saisons précédentes, la saison dernière, j’ai pris en expérience. En maturité, j’ai plus d’assurance et cela s’en ressent sur le terrain. N’oublions pas que l’année dernière, collectivement, nous avons  accompli un énorme exploit collectif en réussissant un maintien à la dernière minute en élevant notamment notre niveau de jeu. Sans oublier les matches que j’ai disputés en sélection qui m’ont boosté et redonné confiance. Pour l’instant, ça se passe bien pour  moi, mais c’est la situation la plus difficile, car en haut, il faut y rester et ne pas se relâcher. C’est quand tout va bien que le danger est là ! Moi, j’ai un niveau d’exigence très élevé vis-à-vis de moi-même et ça me permet de progresser. 
- Pour résumer, la bonne forme de Medjani, c’est l’effet Ajaccio ?
- Ajaccio, je ne pouvais qu’y réussir grâce notamment à la stabilité, car cela fait déjà six ans que je m’y trouve. Ce club est aussi un club familial à dimension humaine où on ne se prend pas la tête. Mais n’oublions pas aussi l’effet équipe nationale qui a aussi énormément joué sur mes performances et mon état d’esprit. Parce que quand vous entrez dans un groupe et que vous participez à une Coupe du monde, que vous côtoyez des joueurs qui jouent dans des championnats plus huppés, cela donne envie de travailler pour se mettre au niveau de ces joueurs.
- En somme, votre statut d’international vous a boosté ?
- C’est cet ensemble de choses qui font qu’aujourd’hui, je suis épanoui, mais je ne veux pas m’arrêter là et je veux progresser encore et évoluer en club comme en équipe nationale pour essayer d’atteindre les objectifs très intéressants qui sont les nôtres. J’espère Incha Allah qu’on va se qualifier pour la CAN et, ensuite, on pourra commencer l’aventure pour se qualifier à la Coupe du monde.
- Justement, en équipe nationale, vous êtes arrivés tout timide à votre première convocation à Crans Montana, et aujourd’hui, vous avez gagné votre place de titulaire et vous êtes devenu le patron de la défense verte. Comment expliquez-vous ce déclic ou cette transformation ?
- Moi, je ne veux pas parler de «déclic», car aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu cette mentalité de gagneur, de vainqueur, même de leader. Maintenant, lorsque je suis arrivé en équipe nationale, la donne n’était pas la même. Certains avaient joué les qualifications et ne figuraient pas dans la liste, et nous, nous avions bénéficié de la cerise sur le gâteau, la place dans les 23 Mondialistes et il fallait faire profil bas. En plus, à l’époque, l’équipe nationale avait un groupe qui tenait la route et une bonne défense. Il aura fallu que je m’arme de patience et que les aléas du football que sont les départs en retraite d’Antar et certaines blessures aient fait que j’ai eu ma chance et je ne l’ai plus lâché. 
- Lorsque vous aviez appris la retraite d’Antar, vous avez écourté vos vacances pour rejoindre le stage bien avant la date initiale figurant sur votre billet. Ce geste avait même surpris Vahid Halilhodzic. Vous vouliez montrer que vous étiez capable de prendre sa succession ?
- Je n’ai vraiment aucun mérite ! L’équipe nationale, ça passe avant tout, on joue pour le pays, on représente une grande nation et on veut tout faire pour être le plus performant, c’est normal. J’aime défendre les couleurs nationales. Pour en revenir à notre discussion d’il y a quelques secondes, à un moment donné, on m’a donné ma chance. J’ai su me mettre au niveau des autres joueurs, mais je dois continuer et travailler dur pour rester en équipe nationale. Cette équipe n’appartient à personne, si ce n’est aux 23 et aux 11 les plus performants du moment. Je veux marquer mon passage en sélection, comme les grands joueurs qui l’ont marqué avant moi. Je pense à Antar (Yahia), à qui je voudrais tirer mon chapeau. Antar Yahia, qui en tant que défenseur central et leader du groupe, a su me mettre dans les meilleures dispositions quand je suis arrivé la première fois.                      
 - Vous semblez très marqué par ces joueurs ?
- Oui, tout à fait. Il y a aussi Karim Ziani, Yazid Mansouri et Madjid Bougherra, qui ont su nous intégrer lorsque nous étions les «nouveaux». Aujourd’hui, la majorité n’est plus avec nous, mais je suis fier d’avoir joué avec eux et de nous avoir accueillis comme ils l’ont fait.
- Vahid Halilhodzic a rendu publique il y a quelques heures la liste des 23 pour la Libye, comment appréhendez-vous ce match ?
- Première chose, ce match se jouera sous forme d’aller et retour. Donc, nous devrons essayer de nous faciliter les choses en réussissant un résultat à l’extérieur. La Libye est un pays qui connaît une situation très difficile et ses joueurs auront à cœur de nous battre, ne serait-ce que pour redonner le sourire à leur peuple. Nous, nous n’avons qu’un objectif, nous qualifier pour la prochaine CAN. A Tripoli, Casablanca ou ailleurs, nous ferons tout pour ramener un bon résultat pour pouvoir être les maîtres de notre destin à Blida.
- A présent, votre popularité a dépassé votre quartier d’El-Harrach. Cette reconnaissance des supporters doit vous faire plaisir, j’imagine ?
- J’en suis très fier, d’autant plus que je suis arrivé sur la pointe des pieds sans faire de vague avec une seule valeur, le travail. J’ai respecté tout le monde, car du fait de mon éducation, je suis très respectueux, mais dans ma tête et dans mes tripes, j’ai toujours voulu devenir quelqu’un dans cette équipe et marquer mon passage comme d’autres l’ont fait avant moi. J’ai joué au légendaire Hanfield Road de Liverpool, mais je n’ai jamais ressenti l’ambiance, le frisson et la pression que l’on ressent à Blida et au 5-Juillet. 
- C’est à ce point ?
- C’est tout simplement magnifique de jouer avec le maillot de l’équipe nationale. Moi, j’ai la chance d’évoluer devant ma famille d’El-Harrach et je suis content de représenter mon quartier et toute l’Algérie. Nous, les défenseurs, sommes habitués à être les parents pauvres des supporters qui préfèrent en général les attaquants et les tricoteurs de balles qui sont plus médiatisés. Le public algérien aime la technique et le fait qu’ils m’apprécient en tant que défenseur me rend doublement heureux, car cela signifie qu’ils ont compris que je donnais tout sur le terrain pour qu’ils soient fiers de moi et remporter les matchs.
- Connaissez-vous votre pseudo en Algérie. Le petit nom que vous ont donné vos fans ?
- Oui, je le connais, c’est un surnom que l’on m’a donné le premier jour à Crans Montana. Michael Scoffield, le héros de la série «Prison Break» à cause des tatouages. Je voudrais juste dire en ce qui concerne ces tatouages, j’étais un peu anxieux par rapport à ça, car je sais que c’est quelque chose qui ne se pratique pas trop chez nous. Maintenant, je voudrais dire que ce n’est pas parce que j’ai les bras tatoués que je ne respecte pas les valeurs de la religion ou du pays, loin de là. Ces tatouages font partie de moi, de ma personnalité, mais croyez bien que sur le terrain, je laisse mes tripes pour défendre les couleurs nationales.
- Face à la Libye, la défense centrale sera inédite. Comment en tant que professionnel, vous allez faire pour gérer cela ?
- Même si Madjid et Bouzid ne seront pas présents, nous profiterons de la semaine de préparation à Sidi Moussa pour effectuer ces quelques réglages. J’ai une entière confiance en Vahid Halilhodzic et en mes coéquipiers et je suis persuadé que la défense alignée sera quasiment prête le jour J et qu’elle s’en tirera bien. En tant que professionnels, on se doit de pallier à toutes les absences et on aura une bonne équipe le 9 septembre Incha Allah.
- Allez-vous visionner des matchs d’Halliche et Belkalem pour essayer de voir leur jeu ?
- Non, cela se fera naturellement sur le terrain aux entraînements, puis le jour du match. De plus, Essaïd (Belkalem) et Rafik (Halliche) ne sont pas des inconnus, puisque j’ai passé un mois entier avec eux aux entraînements en Afrique du Sud et aussi lors du dernier stage d’un mois. Je ne me fais aucun souci par rapport à ça.
- Lorsque vous avez pris cette vilaine béquille il ya deux semaines, Coach Vahid et toute l’Algérie ont retenu leur souffle. Ce soir, vous avez joué avec la cuisse bandée. Est-ce que vous allez mieux ?
- Non, ça va beaucoup mieux. Je ne me suis pas entraîné de la semaine pour pouvoir disputer ce VAFC-Ajaccio. Physiquement, je n’étais pas à 100% de mes capacités, mais cette béquille est derrière moi, et ce soir, je n’ai ressenti aucune douleur, malgré l’intensité du match. Je serai totalement prêt pour le match du 9 septembre. Mon vœu le plus cher est de jouer cette CAN. J’ai connu une Coupe du monde même sans jouer, mais je faisais partie du groupe et je serai très honoré de représenter l’Algérie lors de la prochaine CAN et d’essayer de la remporter Incha Allah.
- Un dernier mot ?
- Je remercie le journal Compétition de s’être déplacé jusqu’à Valenciennes pour prendre de mes nouvelles. Je voudrais souhaiter Aïd Mabrouk à tous les Algériens et le bonheur à l’Algérie et je donne rendez-vous aux supporters le 9 septembre prochain.                   M. B. 

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